Nom. Titus Flavius Domitianus.
Naissance. 24 octobre 51.
Père. L’empereur Vespasien.
Mère. Flavia Domitilla.
Portrait. « Domitien avait la taille haute, un visage modeste et rougissant, de grands yeux, mais une vue assez faible ; de plus il était beau, bien proportionné, surtout pendant sa jeunesse, et dans toute sa personne, si ce n ‘est qu ‘il avait les doigts de pied trop courts ; plus tard, il fut enlaidi par la chute des cheveux, par son obésité, et par la maigreur de ses jambes, qui s’était encore accrue à la suite d’une longue maladie…
Ennemi de toute fatigue, il ne se promena presque jamais a pied dans Rome ; en expédition et en marche, il alla très rarement à cheval, mais habituellement en litière. »
Son entourage ne se fait pas faute de ridiculiser ses travers. « Dans son domaine d’Albano il passait la plus grande partie de son temps a une foule de passe-temps ridicules, comme de percer des mouches avec un stylet » (Dion Cassius). « Cette manie est à l’origine d’une foule de plaisanteries : par exemple, a un visiteur qui demandait s’il y avait quelqu’un au palais, on répondait : pas même une mouche » (Aurelius Victor).
Cependant Domitien n’est pas un homme médiocre. Il possède de solides qualités : intelligence, acharnement au travail, sens des affaires, sens de l’organisation, vision aiguë des nécessités du moment. Mais il possède aussi quelques défauts tenaces. Alors que Titus, son frère, réussit à gommer les siens en montant sur le trône, Domitien, lui, au contraire, les aggrave, au point de tomber malade de son orgueil, de sa méfiance, de son égoi’sme, de sa jalousie, de sa cruauté. A la fin de sa vie, il fait plaquer les parois de son palais de miroirs lui permettant de voir tout ce qui se passe autour et derrière lui pour parer à un éventuel attentat.
Formation. Alors que son père mise tout sur Titus en lui donnant la meilleure éducation possible, il ne donne à Domitien qu’une formation très sommaire. Si celui-ci reçoit tous les honneurs dus à son rang, son caractère brouillon et rancunier ne plaît pas à son père qui l’écarté de la conduite des affaires. On ne lui fait donc faire aucun apprentissage ni de l’administration, ni de l’armée. C’est « sur le tas » qu’il apprend son métier d’empereur.
Mariage. Il épouse Domitia Longina, la fille du général Corbulon dont les succès militaires suscitent la jalousie de Néron. Celui-ci ordonne sa mort. Corbulon devance son assassinat en se suicidant. Ecrivain à ses heures, ses mémoires servent de sources à Tacite. Domitia Longina lui donne, en 73, un premier fils, Vespasien, qui meurt jeune.
Il la chasse ensuite pour inconduite, la reprend et lui fait, en 90, un second fils qu’il appelle de nouveau Vespasien. Ce deuxième enfant meurt jeune, lui aussi, à l’âge de cinq ans.
Cursus. Domitien se trouve à Rome en décembre 69, lors de la prise de la ville par l’allié de son père, Antonius Primus. Durant la bataille de rues que les soldats de ce général doivent mener pour éliminer les partisans de Vitellius, il manque de peu d’être brûlé vif dans l’incendie du Capitole.
Une fois la ville conquise, Vespasien lui demande de le représenter à Rome, mais Domitien profite de la situation pour mener la plus joyeuse des vies de débauche. C’est une des raisons qui pousse Vespasien à confier à son autre fils Titus le soin de terminer la guerre de Judée et à prendre le plus rapidement possible le chemin de Rome.
Dies imperii : 14 septembre 81 ap. J.-C.
Règne. Ce n’est que le lendemain de la mort de son frère Titus, survenue le 13 septembre 81, que le Sénat lui confie tous les pouvoirs impériaux. Il est alors âgé de trente ans.
Son père Vespasien avait fait du retour au principat le fondement même de son gouvernement, Domitien, lui, développe un régime de plus en plus absolu et centralisé. Il n’est donc pas étonnant qu’il s’attire une haine farouche du Sénat et de la classe politique exclue du pouvoir.
Pour gouverner, il s’appuie avant tout :
– sur l’armée dont il s’attache la fidélité, en augmentant la solde des légionnaires de deux cent vingt-cinq à trois cents deniers annuels ;
– sur la classe des chevaliers qui domine le monde des affaires et de la finance. Il lui confie l’administration de l’empire ;
– sur le peuple, en multipliant les fêtes et en procédant à de nombreuses distributions d’argent et de nourriture.
Ces mesures le rendent bien entendu très populaire dans les armées, la garde prétorienne, les provinces dont il surveille très étroitement la gestion et la plèbe de Rome. Mais en se donnant le titre officiel de « Dominus et Deus », il pousse les Juifs et les chrétiens dans l’opposition.
De 81 à 89, cette opposition politique et religieuse se tient dans l’expectative, avec une poussée de fièvre cependant en 83, année durant laquelle Domitien doit faire face à plusieurs complots.
Dès 93, le Sénat et les intellectuels engagent l’épreuve de force. Domitien réagit brutalement par des exécutions, des expulsions et une persécution sanglante qui frappe tous azimuts, aussi bien les sénateurs que les chrétiens ou les Juifs.
Sur les frontières, sa politique s’inspire de deux principes complémentaires. Renforcer militairement leur défense et mener une politique active auprès des peuples qui vivent le long du limes, soit en leur faisant la guerre, soit en établissant sur eux un protectorat. Il obtient de bons résultats en Bretagne et sur le Rhin. En Orient, il parvient à maintenir la paix avec les Parthes. Par contre, sur le Danube, il subit quatre défaites contre les Daces et perd deux légions. Il doit traiter en position de faiblesse.
Le régime de terreur auquel Domitien soumet la capitale depuis 93, ne cesse de soulever de nouvelles haines contre lui. Même les membres de sa propre famille ne se sentent plus en sûreté. Le 18 septembre 96, un complot fomenté par sa propre femme, les deux préfets du prétoire, des intimes du palais et des sénateurs, qui, tous, craignent pour leur vie, réussit. Domitien est poignardé, à la cinquième heure, au cours d’une audience, non sans qu’il se défende désespérément.
Avec lui s’éteint la dynastie flavienne.
Comme pour l’empereur Néron, les biographes brossent un portrait de Domitien très contrasté. Beaucoup ne retiennent que les trois dernières années de son règne qui sont les plus sanglantes. Pline le Jeune et Tacite, qui appartiennent au monde sénatorial, noircissent à plaisir son portrait. Ils le dépeignent comme un personnage au caractère difficile, vaniteux, méfiant, ne supportant pas la comparaison avec son frère Titus. D’autres comme Stace et Martial s’arrêtent avant tout sur les côtés positifs de son règne. Suétone tient peut-être le juste milieu en soulignant son sens du devoir, son souci d’administrer au mieux les provinces, ses innovations, mais aussi en relevant la trajectoire suivie par cet empereur qui, de premier citoyen de l’Etat se transforme peu à peu en un monarque absolu, tyrannique, cruel et cupide.
Dixit. S’il n’hésite pas à condamner trois Vestales à être enterrées vives pour avoir manqué à leur voeu de chasteté, s’il renouvelle la loi Julia sur l’adultère et le concubinat et la fait appliquer strictement, lui n’hésite pas à séduire et à engrosser sa nièce Julia, alors qu’elle est mariée, et à s’entourer de concubines et de courtisanes de tout acabit. « D’une lubricité excessive, il considérait les plaisirs de l’amour comme une sorte d’exercice journalier, qu’il appelait gymnastique du lit » (Suétone).
Sources.
Suétone, Vies des douze Césars, VIII.
Dion Cassius, Histoire romaine, LVI.
Aurelius Victor, Livre des Césars, XI.
Source. » Les empereurs Romains – 27 av. J.-C. – 476 ap. J.-C. » – François ZOSSO – Christian ZINGG.